
Un jeune juif américain, dont l'enfance a été bercée par les histoires que son grand-père se plaisait à lui raconter, s'en va à la recherche de son oncle Shmiel disparu en Galicie pendant la guerre, tué par les nazis.
Généalogiste amateur, j'ai retrouvé dans ce livre beaucoup de sentiments partagés avec l'auteur, Daniel Mendelsohn.
Recherchant des renseignements sur les gens qui avaient vécu auparavant dans notre moulin du Cantal, j'ai retrouvé 4 personnes agées de plus de 90 ans ayant connu le meunier et sa femme. J'imagine que quelques années trop tard, c'était les quelques brindilles de la mémoire du moulin qui s'envolait à tout jamais.
Tous les jours un peu de cette mémoire disparaît, soit parce que son détenteur s'en va à tout jamais, soit parce que ses souvenirs s'estompent.
J'ai eu le bonheur de récupérer trois photos du meunier et de sa femme. C'était pour moi un véritable trésor. Combien de photos sans légende sont découvertes en débarrassant des vieux papiers. Ces visages sans nom meurent une deuxième fois. Etre encore un peu vivant, c'est encore faire partie un peu des souvenirs de quelqu'un.
D. Mendelhson décrit également la fragilité des témoignages souvent contradictoires. J'ai pu le mesurer également lorsque l'accident survenu à la meunière m'a été racontée. La pauvre femme est tombée de son pommier à 75 ans: trois personnes différentes déclarent lui avoir porté secours...
La tentation est grande de confier à Internet ses photos, légendes, récits en se disant que ces richesses ne seront pas perdues, qu'il y aura toujours quelqu'un pour s'y intéresser... Mais ne peut-on pas craindre que pages et documents ne s'accumulent de façon infinitésimale sur des serveurs de plus en plus puissants et que nous ne sachions même plus extraire la petite photo ou le petit renseignement tant ils seront noyés dans une masse de données incommensurable.
Il y a par contre dans le livre de D. Mendelhson une dimension tragique qui n'a plus rien à voir avec ma petite expérience de généalogiste. Le jeune juif américain découvre dans le détail l'horreur de l'Holocauste: sur les 6.000 juifs de la ville de Bolechow, seule une quarantaine a survécu aux massacres.